Le riz est l’un des aliments les plus utilisés en cuisine, et un met traditionnel des pays asiatiques. Préparé avec des légumes, avec des sauces diverses ou simplement laissé « blanc », on le retrouve également dans les plats les plus raffinés. Saviez-vous pourtant que le riz avait une légende ? Une légende ancienne qui s’est transmise oralement durant plusieurs siècles ? Permettez-moi de vous la narrer…
Un vrai travailNous, pauvres citoyens modernes, avons l’habitude de trouver notre riz tout prêt (ou pratiquement) dans les allées de notre supermarché. Pourtant, savez-vous quelle quantité de travail il faut entreprendre avant de le retrouver emballé et prêt-à-manger ? Et surtout, imaginez-vous tout le travail que fournit le paysan ?
En premier lieu, le paysan laboure la terre encore, et encore, avant de pouvoir y piquer les jeunes plants de riz. Il faut bien sur l’irriguer constamment car les plants poussent dans des endroits humides et adorent l’eau. Mais il ne faut pas non plus inonder ces pauvres rizières. Sans parler des sècheresses. Courageux que ces paysans qui fournissent un travail aussi laborieux.
Une fois les tiges de riz mures, il faut les libérer, décortiquer le tout, blanchir le riz avant de l’envoyer pour la consommation. Pourtant, cela n’a pas toujours été comme cela.
Un riz bien élevéCette légende remonte à plusieurs milliers d’années. On y raconte que les grains de riz étaient alors aussi gros que des bols, et qu’il ne fallait fournir aucun effort que pour les cultiver. Un rêve. Vous jetiez un seul de ces gros grains dans le sol détrempé par la pluie, et cela suffisait. Ce grain se briserait en milliers de petits morceaux qui, au fil des jours, produiraient des jeunes tiges de riz.
C’est qu’elles sont braves ces tiges, car elles poussent d’elles-mêmes. A maturité, les grains tombent sur le sol, tels des flocons de neige – de gros flocons, certes –, roulent sur eux-mêmes et trouvent le chemin du grenier de leur courageux cultivateur, afin d’y aller s’y stocker. Que restait-il à faire donc ? Décortiquer le tout et les blanchir.
La contrepartieSi le riz faisait tout pour rendre la vie de l’homme aussi paisible que possible, il exigeait cependant une contrepartie : lorsqu’il se rendait dans le grenier du paysan, il exigeait qu’on l’accueille dignement.
Qu’est-ce que cela signifie ? Chaque maison doit en premier lieu être soigneusement nettoyée pour son arrivée. C’est qu’ils sont fragiles ces grains de riz, et ils ne supportent ni la saleté, ni la poussière. De plus, n’oubliez pas de leur consacrer une cérémonie solennelle, pour laquelle l’autel des ancêtres sera garni d’offrandes, et de l’encens et des bougies brûleront. Il reste au chef de famille à se prosterner – geste imité ensuite par la famille entière – et à remercier le ciel pour ce cadeau.
La fauteTout allait bien dans le meilleur des mondes lorsqu’une femme, par sa coquetterie, vint détruire ce bel arrangement du ciel. Une année – c’était vers le 10e mois – les grains de riz mûr se préparaient à rentrer au grenier. Pendant qu’il préparait l’autel familial, un mari pria sa femme de balayer la maison. C’était une ménagère obéissante, douce et qui aurait été parfaite si elle n’avait eu un petit défaut fort commun chez les dames : la coquetterie. Sa toilette occupait la majeure partie de son temps, et même pendant le travail elle ne cessait de penser à ses robes et à ses souliers.
Dans deux mois ce serait la fête du Têt. Pour célébrer cela comme il se doit, elle songeait à la robe qu’elle porterait le jour de l’an. Elle nettoya la maison de façon distraite, prenant son temps, rêvassant, s’arrêtant et flânant. Porterait-elle la jolie toilette verte héritée de sa mère ? Ou la jaune qui mettait ses yeux en valeur ? Non, la rouge voyons. Ca lui permettrait de porter ce collier si joli offert par son mari.
Perdue dans ses rêves, elle ne comprit que trop tard sa faute. Le riz entrait déjà dans la maison, et un grain heurta si violemment le balai qu’il éclata en mille morceaux.
Son époux, qui se recueillait depuis un certain temps devant l’autel, arriva en criant. Les enfants, attirés par tout ce bruit, arrivèrent en courant. Poules et coqs se joignirent à la fête et se mirent à picorer frénétiquement les pauvres petits grains de riz.
La sentenceUne voix s’éleva peu à peu, et le silence se fit : « Comment osez-vous ? Voilà donc tout le respect que l’on me témoigne ? A partir d’aujourd’hui et ce, par votre faute, jamais plus je ne me présenterai à votre porte. Il vous faudra venir me chercher à la rizière et me couper à coups de faucille. De plus, je ne me présenterai plus en gros grains, mais en petits morceaux. Et si vous voulez me récolter, il vous faudra travailler ! Je ne pousserai que dans des terres labourées et sans cesse irriguées. Si vous voulez me recueillir, il faudra le faire au prix de mille soins et à la sueur de votre front ! »
Depuis cette date, et par la faute d’une femme coquette; commence la vie pénible du cultivateur.
Source « Légendes des Terres Sereines », Pham Duy Khiêm
On se sent vachement valorisées dans les legendes, nous les femmes... c'est trop bien